Cyclisme

Sagan, encore !

Peter Sagan, favori de la foule, a remporté le Grand Prix cycliste de Québec pour une deuxième année de suite, hier, signant ainsi la 100e victoire de sa carrière professionnelle.

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« On a eu le contrôle pendant toute la course »

Québec — Rigoberto Urán a encore tenté son coup du kilomètre, mais il n’y a pas eu de suspense. Rendu là, tout le monde savait ce qui arriverait.

À 150 m, un homme en blanc, maillot irisé de champion du monde, s’est levé pour écraser ses pédales. La foule a rugi de plaisir. Peter Sagan, le favori de tous, s’est ensuite moqué de ses rivaux. Le médaillé d’or olympique Greg Van Avermaet, qui était dans sa roue, a mordu la poussière. L’Australien Michael Matthews, meilleur sprinteur du Tour de France, aussi.

Pour une deuxième année de suite, Sagan a remporté le Grand Prix cycliste de Québec, hier, signant ainsi la 100e victoire de sa carrière professionnelle. Sur le podium, le Slovaque de 27 ans ne savait plus quoi faire des cadeaux que lui remettaient l’organisation et des commanditaires : un trophée, une bouteille de sirop d’érable, un magnum de champagne, un ensemble d’outils, une pompe…

« 100, c’est un beau chiffre, mais c’est encore mieux si tu peux vivre 100 ans », a lancé Sagan en boutade.

À le voir aller sur deux roues, il aura l’énergie pour se rendre à cet âge vénérable. « L’année passée, j’étais arrivé ici après une maladie et je ne pensais pas être prêt à gagner, a-t-il expliqué. Cette année, tout était différent. Nous avons décidé de commencer à travailler dès le départ et on a eu le contrôle pendant toute la course. »

« Mes coéquipiers de Bora-Hansgrohe ont fait un travail fantastique et j’étais heureux de gagner le sprint final pour eux. »

— Peter Sagan

Quatre coureurs en échappée au premier tour

Disputé en un peu plus de cinq heures (moyenne de 40 km/h), le huitième GP de Québec, qui s’est finalement terminé sous un beau soleil, n’a pas produit les feux d’artifice des présentations précédentes.

Quatre coureurs sont partis en échappée dès le premier des 16 tours de 12,6 km : les Belges Van der Sande (Lotto Soudal) et Planckaert (Katusha), l’Américain Tyler Williams (Israel Cycling Academy) et surtout le Canadien Pier-André Côté (équipe canadienne), 20 ans et plus jeune partant.

Pendant que le peloton musardait, le quatuor a pris une avance de presque 10 minutes. Guillaume Boivin en a profité pour échanger quelques mots avec son ancien coéquipier Sagan dans la côte de la Montagne et le féliciter pour son bébé à venir.

La causerie n’a pas duré longtemps. Les trois équipes de favoris ont pris les choses en main pour réduire graduellement l’écart avec l’échappée, en particulier les Bora-Hansgrohe, aidés par les BMC de Van Avermaet et les Sunweb de Matthews. Le rapport de force était bien établi.

Au 11e tour, Côté, de Lévis, a été le premier à craquer, non sans avoir fait plaisir à ses nombreux partisans (voir autre texte). Williams et Van der Sande ont connu le même sort un peu plus loin, tandis que Planckaert a résisté jusqu’à l’avant-dernière boucle.

« Le vent a eu un grand impact »

Quelques timides attaques ont suivi (De Bie, Ellisonde, Kreuziger), mais rien pour menacer l’emprise de Bora. « Le vent a eu un grand impact sur la course aujourd’hui, a analysé Matthews. Personne ne pouvait vraiment attaquer sur la montée et ensuite on revenait vent de dos sur le boulevard. Il y avait donc un vraiment gros peloton dans le final. Avec le vent, c’était un peu trop facile pour vraiment ouvrir et attaquer un peu pour rendre ça excitant. Ç’aurait été bien d’avoir une course un peu plus folle, comme on en voit normalement à Québec. »

Sagan était plus ou moins d’accord, mais il a convenu que le vent de face avait rendu le sprint du dernier kilomètre « vraiment difficile ».

« J’avais toujours un coéquipier pour tirer à l’avant et contrôler si quelqu’un passait à l’attaque, a-t-il relaté. Tout le monde s’attendait à ce que Rigoberto attaque dans le dernier kilomètre et il l’a fait encore ! On a couru derrière lui et j’ai attendu les 100 derniers mètres pour lancer le sprint. »

Campé dans la roue du Français Alexis Vuillermoz (4e), Sagan a bondi à sa droite pour surprendre Van Avermaet (2e). Bien emmené par le gagnant du Giro Tom Dumoulin, Matthews (3e) a regretté d’avoir lancé son sprint « un peu trop tard ».

Comme l’an dernier, où il avait aussi fini deuxième à Québec, Van Avermaet espère maintenant prendre sa revanche au GP de Montréal, disputé demain sur le mont Royal. Cette fois, il ne faudra pas trop attendre.

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La folle journée de Pier-André Côté

Québec — En 2013, Pier-André Côté, maillot du club cycliste de Lévis sur le dos, tentait de suivre les meilleurs coureurs au monde, pédalant de l’autre côté de la clôture le long du boulevard Champlain.

Quatre ans plus tard, l’athlète de 20 ans était le plus jeune partant du Grand Prix cycliste de Québec, hier. Comme il l’avait annoncé en conférence de presse, le représentant de l’équipe nationale canadienne n’allait pas se laisser impressionner à sa première épreuve de niveau WorldTour.

« Si on est défaitiste, on part avec une prise contre soi », avait indiqué celui qui avait entamé la veille un baccalauréat en actuariat à l’Université Laval.

Fidèle à ses paroles, Côté est parti en échappée dans le premier tour, joignant ses efforts à ceux de deux Belges et d’un Américain. Le champion canadien du critérium a vite compris que la journée serait longue, d’autant que sa tige de selle s’est mise à descendre millimètre par millimètre. Incapable de communiquer avec la voiture d’équipe, il a dû se rabattre sur le dépannage neutre, avant de changer de vélo dans les puits deux tours plus tard.

Les kilomètres à pédaler dans une position inconfortable l’ont passablement entamé. « J’étais loin d’être le plus fort de cette échappée, a admis Côté. Ça n’a pas aidé de gaspiller un peu d’énergie, mais je ne vous cacherai pas que je ne leur aurais pas donné une volée sans ce problème de selle. »

Le Québécois a pu prendre les points du classement de la montagne, mais s’est fait un peu houspiller par Tosh Van der Sande (Lotto Soudal), qui exigeait des relais plus appuyés. Côté a obtempéré.

Dans le rouge

Au fil des tours, la bouche du jeune coureur s’ouvrait de plus en plus. Le point de rupture approchait. « C’est un peu comme rouler sur [l’autoroute 20] en voiture, a-t-il illustré. On voit la jauge du réservoir descendre tranquillement pas vite. Ça fait de plus en plus mal. Quand tu es vraiment dans le rouge, tu essaies de résister le plus longtemps possible, mais tu sais que ça ne durera pas. »

Le double médaillé d’or des Jeux du Canada s’est fait lâcher au 11e passage dans la côte de la Montagne, après 135 km d’efforts.

« Ça n’a pas été si pire de me voir dépérir de tour en tour ? », s’est-il enquis auprès des deux journalistes venus l’interroger dans le box de l’équipe canadienne.

« Il y a un peu de déception, mais j’ai poussé mon corps jusqu’où j’en étais capable », a convenu Côté, sélectionné pour les Mondiaux de Bergen dans la catégorie U23. « Je ne peux qu’être satisfait. »

Alors que la course battait encore son plein, Côté est allé retrouver ses parents dans l’aire d’arrivée. Peut-être dans l’énervement, sa mère a trébuché… et s’est fracturé une cheville.

« Mes deux parents sont infirmiers, ils ont su garder leur sang-froid », a fait savoir Côté, qui attendait des nouvelles de l’hôpital en début de soirée. « C’est une grosse journée pour la famille… »

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Boivin déçu

Contrairement à l’an dernier, Guillaume Boivin ne tirait aucune fierté de son « titre » de meilleur Canadien au Grand Prix cycliste de Québec. Obligé de changer de vélo deux fois dans les quatre derniers tours en raison d’un bris de dérailleur, le représentant d’Israel Cycling Academy s’est classé 29e, à l’arrière du premier groupe réglé par Peter Sagan. « J’ai repris mon vélo de course avec deux tours à faire. On a fait ça plus vite qu’en Formule 1, mais je ne suis pas Sagan, je ne peux pas me permettre de faire ça », a soupiré celui qui visait une place parmi les 10 premiers. « Ça m’a quand même coûté cher dans le final. J’ai fait de mon mieux, mais il me manquait un peu de jambes pour les 300 derniers mètres. »

Ils ont dit

« Je savais que dans une formule de course comme ça, je n’allais pas pouvoir beaucoup sortir mes cartes. Quand ça arrive en gros peloton, je n’ai pas ce genre de puissance. J’ai plus la force pour rouler au pied [des montées] pour placer les autres. Mais pour me placer et après sprinter, c’est compliqué. L’équipe nationale a quand même fait une belle course. On était représentés à l’avant et on a fait du mieux qu’on pouvait. »

— Antoine Duchesne, 56e à 25 secondes de Peter Sagan

« La course était légèrement différente par rapport à l’an dernier, car il y a eu peu d’attaques. J’ai essayé de garder des forces pour le sprint final. Je suis content de monter sur le podium ici, ce sont de bonnes sensations en prévision des Mondiaux. [Demain], j’espère battre Peter et gagner à Montréal comme l’an dernier. »

— Greg Van Avermaet (2e)

« On voit en Hugo un coureur qui peut renforcer notre équipe dans la saison des classiques printanières. En dépit de son jeune âge, il a une énorme expérience dans les plus grandes classiques, incluant les monuments comme Milan-San Remo, le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. En même temps, on doit se rappeler que Houle est très jeune et qu’il en est encore à tracer son propre chemin dans le cyclisme professionnel. En plus de soutenir nos meneurs dans les classiques, Hugo aura la chance de faire ses preuves. »

— Alexandre Vinokourov, directeur général d’Astana, dans le communiqué confirmant l’embauche du Québécois Hugo Houle pour les deux prochaines saisons

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